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CHSCT GEOLOCALISATION

Le CHSCT est le principal acteur en matière de santé et de sécurité au travail.

Cette instance, tant décriée par certains et faisant l’objet d’une mise en coupe réglée notamment au travers de la Loi REBSAMEN du 17 août 2015 dispose de la faculté de procéder au vote d’expertises pour deux motifs résultant de l’article L. 4614-12 du Code du Travail, à savoir :

  • Soit pour risques graves (alinéa 1)
  • Soit pour modifications importantes des conditions de travail (alinéa 2).

Un sujet peu évoqué, consiste en l’appréciation d’une modification importante des conditions de travail du fait de la mise en place, au sein d’une société déterminée, d’un dispositif de géolocalisation.

Cette question a été tranchée par la Cour d’Appel de Grenoble tenant le cas de la société ORANGE.

Au cas d’espèce, la société ORANGE avait mis en place, au sein de sa flotte de véhicules, un dispositif de géolocalisation qui émanait d’une filiale d’ORANGE, géolocalisation présentée officiellement aux instances comme non intrusive, c’est-à-dire destinée simplement à contrôler les distances parcourues afin de suivre l’état et la consommation des véhicules.

De fait, le dispositif était officieusement fondamentalement différent, et visait un suivi et contrôle des personnels y compris des salariés protégés.

Le CHSCT a voté une expertise en raison d’un « projet important » dû à l’intégration d’un boîtier « fleetperformance » version « gestion des flottes » dans les véhicules des techniciens d’intervention client du périmètre de l’Unité d’Intervention Rhône Durance, de la Direction Territoriale Sud Est de ORANGE

La société ORANGE avait saisi le Tribunal de Grande Instance de Valence statuant en la forme des référés afin de contester le vote de cette expertise.

Par décision du Tribunal de Grande Instance de Valence du 17 avril 2013, le CHSCT avait été débouté.

Par réformation de l’ordonnance rendue en la forme des référés par le Tribunal de Grande Instance, la Cour d’Appel de Grenoble, par un arrêt du 18 mars 2014 (N° RG 13/01860), a ainsi jugé :

  • « Infirme l’ordonnance entreprise,
  • Débouté la société ORANGE de sa demande d’annulation de l’expertise confiée le 21 décembre 2012 au Cabinet TECHNOLOGIA,
  • Condamne la société ORANGE à supporter les honoraires du conseil du CHSCT afférents à la première instance et à la procédure d’appel. »

Cette décision, l’une des premières sur la question , a été rendue après que la Cour d’Appel de Toulouse, saisie d’une problèmatique identique, ait débouté le CHSCT de sa demande d’expertise.

Ici, de manière particulièrement précise, la Cour d’Appel de Grenoble met en évidence que :

  • ce dispositif pouvait générer pour certains agents, des problèmes de stress et déboucher sur des sanctions disciplinaires :

« il résulte des motifs de la délibération et des comptes rendus d’entretien des réunions du CHSCT que certains de ses membres craignent que le dispositif permette un contrôle des déplacements des utilisateurs des véhicules notamment de la ponctualité des agents et que ce contrôle soit source de stress et débouche sur des sanctions disciplinaires. ».

  • Le dispositif permettait la localisation des véhicules à tout moment et non pas uniquement e cas de vol comme le soutenait la société ORANGE :

« Le dispositif « fleetperformance », qui rendait possible la localisation d’un véhicule volé permettrait potentiellement à la société ORANGE de localiser les véhicules à tout moment. Madame B. qui représentait la Direction lors de la séance des 24 et 25 janvier 2012 du Comité Central de l’Unité Economique et Sociale l’a reconnu en expliquant que le système « ne peut faire de la géolocalisation qu’en ponctuel » et que « la géolocalisation est désactivée tout le temps, elle est activée qu’en cas de vol. ».

Pour conclure, la Cour d’Appel de GRENOBLE a noté : « La mise en œuvre d’un tel dispositif est susceptible d’entrer dans le champ de la délibération de la CNIL n° 2006- 066 du 16 mars 2006 portant adoption d’une recommandation relative à la mise en œuvre d’un dispositif destiné à géolocaliser les véhicules automobiles utilisés par les employés d’un organisme privé ou public, compte tenu de ses implications, il s’agit d’un projet important de nature à affecter les conditions de travail des agents au sens de l’article L. 4614-12 2° du Code du Travail, la décision du CHSCT de faire appel à un expert n’appelle aucune critique. ».

Ainsi le dispositif de géolocalisation mis en œuvre par les sociétés employeur, de par les conséquences pour les personnels, d’abord, par la nature du contrôle institué ensuite, caractérise une modification importante des conditions de travail au sens de l’article 4614-12 alinéa 2 du Code du Travail. La plus grande prudence s’impose….et justifie pleinement l’intervention du CHSCT.

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